Abus de marché – Délit d’initié

I – PRINCIPE

Il est interdit à toute personne détenant une information privilégiée d’utiliser cette information pour acquérir ou céder, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, directement ou indirectement, des instruments financiers auxquels ladite information se rapporte.

Il est également interdit de recommander à une autre personne d’effectuer de telles opérations, ou de l’inciter à le faire, ainsi que de divulguer cette information en dehors de l’exercice normal de ses fonctions ou de sa profession.

Ces règles s’appliquent notamment aux dirigeants et mandataires sociaux d’émetteurs cotés, à leurs salariés, prestataires externes, ainsi qu’à toute personne ayant eu connaissance de ces informations dans le cadre d’une relation professionnelle ou personnelle.

Définition de l’information privilégiée

Selon l’article 7 du Règlement (UE) n° 596/2014 du 16 avril 2014 (dit Règlement MAR) et l’article 622-1 du Règlement général de l’Autorité des marchés financiers (AMF), constitue une information privilégiée toute information répondant aux quatre critères cumulatifs suivants :

  1. Elle n’est pas publique ;
  2. Elle est précise ;
  3. Elle concerne directement ou indirectement un émetteur ou un instrument financier ;
  4. Si elle était rendue publique, elle serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés.

II – OBLIGATIONS DES DÉTENTEURS D’INFORMATIONS PRIVILÉGIÉES

Afin de prévenir toute violation des règles relatives aux abus de marché, les personnes en possession d’une information privilégiée doivent observer les obligations suivantes :

Obligation d’abstention de toute opération

Tant que l’information demeure non publique, elles doivent s’abstenir d’acquérir, de céder ou de tenter de négocier des instruments financiers auxquels cette information se rapporte.

Obligation de non-divulgation

L’information privilégiée ne peut être communiquée à des tiers que dans le strict cadre de l’exercice normal des fonctions professionnelles.

Toute divulgation intentionnelle injustifiée constitue une violation des règles applicables.

Obligation de vigilance renforcée

Les personnes occupant des fonctions sensibles (dirigeants, administrateurs, cadres disposant d’un accès privilégié à l’information) doivent :

– Être inscrites sur la liste des initiés tenue par l’émetteur ;

– Déclarer leurs propres opérations sur titres conformément à l’article 19 du Règlement MAR (régime des transactions des dirigeants).

III – SANCTIONS

A. Sanctions pénales (France)

Conformément à l’article L. 465-1 du Code monétaire et financier :

a) Pour les personnes détenant l’information à raison de leurs fonctions ou en qualité de dirigeants :

– Peine d’emprisonnement de deux ans ;

– Amende pouvant atteindre 1,5 million d’euros, montant pouvant être porté jusqu’à dix fois le profit réalisé et ne pouvant être inférieur à celui-ci.

b) Pour toute autre personne agissant en connaissance de cause :

– Peine d’emprisonnement de un an ;

– Amende de 150 000 euros, également susceptible d’être portée jusqu’à dix fois le profit réalisé.

c) Lorsque l’information se rapporte à un crime ou à un délit :

– Peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à sept ans ;

– Amende d’au moins 1,5 million d’euros si le profit est inférieur à ce montant.

d) En cas de diffusion d’informations fausses ou trompeuses :

– Peines identiques (deux ans d’emprisonnement et 1,5 million d’euros d’amende).

e) Recel d’information privilégiée :Toute personne utilisant sciemment une information privilégiée obtenue illicitement peut être poursuivie, même si l’identité de l’auteur initial de la divulgation est inconnue.

B. Sanctions administratives (AMF)

La Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF) peut prononcer :

– Une sanction pécuniaire pouvant atteindre :

* 100 millions d’euros pour les personnes morales ; ou

* Dix fois le montant du profit réalisé ;

– Des interdictions temporaires ou définitives d’exercer certaines activités professionnelles.

Les procédures administratives de l’AMF sont indépendantes des procédures pénales, mais peuvent être conduites parallèlement.

IV – CADRE EUROPÉEN

Le Règlement (UE) n° 596/2014 du 16 avril 2014 (Market Abuse Regulation – MAR), applicable directement dans tous les États membres, encadre :

– La définition du délit d’initié ;

– Les obligations de transparence et de diffusion des informations privilégiées ;

– Les sanctions administratives ;

– Le rôle des autorités nationales compétentes, dont l’AMF pour la France.

Les émetteurs dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé doivent notamment :

– Tenir une liste d’initiés à jour ;

– Rendre publique sans délai toute information privilégiée les concernant, sauf report de publication dans les conditions prévues par le MAR ;

– Déclarer les opérations effectuées par leurs dirigeants.

Références juridiques

– Code monétaire et financier : articles L. 465-1 à L. 465-4 et L. 621-15

– Règlement (UE) n° 596/2014 (MAR) : articles 7 à 30

– Règlement général de l’AMF : articles 622-1 à 622-3

– Code pénal : article 321-1 (recel)

Clause de non-responsabilité

Cette note a été préparée par le cabinet JACQUES ELIE LEVY AVOCAT à des fins exclusivement informatives. Elle ne constitue ni un avis juridique ni une consultation au sens de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971. Les informations qu’elle contient reposent sur l’état du droit à la date de publication et sont susceptibles d’évoluer. Elles ne sauraient se substituer à une analyse au cas par cas de chaque situation. Le cabinet ne saurait être tenu responsable des décisions prises sur la seule base de la présente note.Le cabinet JACQUES ELIE LEVY AVOCAT se tient à la disposition du lecteur pour examiner, le cas échéant, la problématique juridique particulière qui l’occupe et lui fournir un accompagnement adapté.

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